La gazelle du Tibet (Procapra picticaudata) est un mammifère appartenant à la famille des bovidés et au genre Procapra, qui regroupe également la gazelle de Przewalski et la gazelle de Mongolie. Cette espèce endémique des hauts plateaux tibétains s'est adaptée aux conditions extrêmes de son environnement, où les températures peuvent être glaciales et la nourriture limitée. Malgré son apparence gracieuse et son mode de vie discret, la gazelle du Tibet joue un rôle clé dans l'écosystème fragile des prairies d'altitude. La gazelle du Tibet est également appelée Goa.
La gazelle du Tibet est un animal de taille moyenne, bien adapté aux conditions rigoureuses des hauts plateaux himalayens. Les mâles et les femelles présentent un dimorphisme sexuel modéré, principalement visible à travers la présence de cornes chez les mâles. Ces cornes sont fines, légèrement incurvées et peuvent mesurer entre 20 et 30 cm de long. Les femelles, quant à elles, en sont généralement dépourvues. Les adultes mesurent environ 91 à 105 cm de longueur, avec une hauteur au garrot variant entre 54 et 65 cm. Leur poids oscille entre 13 et 16 kg, les mâles étant souvent plus massifs que les femelles.
Le pelage de la gazelle du Tibet est court en été et plus dense en hiver, offrant une protection contre le froid. Il est principalement de couleur brun sable sur le dos, avec des teintes plus claires sur les flancs et un ventre presque blanc. Cette robe discrète assure un camouflage efficace dans les paysages arides et rocailleux où elle évolue. Le nom scientifique de l’espèce, picticaudata, fait référence à la caractéristique particulière de sa queue bicolore, noire à l’extrémité et plus claire à la base. Cette queue, bien visible lorsqu’elle est relevée, pourrait jouer un rôle dans la communication visuelle entre les individus.
Vivant à des altitudes comprises entre 3 000 et 5 500 mètres, la gazelle du Tibet possède une capacité respiratoire optimisée pour survivre en haute montagne, où l’oxygène est rare. Son système circulatoire a évolué pour permettre une meilleure absorption de l’oxygène, et son sang contient une forte concentration d’hémoglobine.
La gazelle du Tibet est originaire de Chine et d'Inde. Bien que 99 % de sa population réside dans les plateaux tibétains, de petites populations vivent également dans certaines zones voisines des plateaux indiens.
La gazelle tibétaine semble préférer les hautes altitudes. Elle évolue dans les plaines élevées, les collines et les plateaux montagneux comportant des plantes herbacées (non ligneuses), un élément important pour son habitat. Ce bovidé peut être observé à des altitudes comprises entre 300 et 5 750 m.
La gazelle du Tibet est une herbivore stricte, dont le régime alimentaire varie en fonction des saisons et de la disponibilité des ressources. Elle se nourrit principalement de graminées, d'herbes et de petits arbustes, adaptés aux conditions semi-arides des hauts plateaux tibétains.
Pendant l’été, elle se nourrit d’herbes fraîches, riches en nutriments et en eau, ce qui limite son besoin de boire fréquemment. L’hiver, lorsque les températures chutent et que le sol gèle, la gazelle du Tibet se rabat sur des lichens, des mousses et des racines, qui lui fournissent l’énergie nécessaire à sa survie. Grâce à son estomac complexe, elle est capable d’extraire un maximum de nutriments des végétaux qu’elle consomme. Comme les autres ruminants, elle régurgite une partie de sa nourriture pour la mâcher à nouveau, ce qui facilite la digestion des fibres végétales.
La gazelle du Tibet tire la majeure partie de son eau de son alimentation. Toutefois, lorsqu’elle en a l’occasion, elle boit dans les rares points d’eau disponibles sur son territoire. Elle est également capable de résister à la déshydratation pendant de longues périodes, une adaptation essentielle dans un environnement où l’eau est une ressource rare.
La reproduction de la gazelle du Tibet est saisonnière, avec un pic d’accouplement en hiver et des naissances qui surviennent à la fin du printemps ou au début de l’été. Ce cycle permet aux jeunes de bénéficier des conditions les plus favorables pour leur croissance, lorsque les pâturages sont plus verdoyants.
La période de rut a lieu entre novembre et janvier. Durant cette période, les mâles deviennent particulièrement agressifs et territoriaux. Ils se livrent à des combats pour s’accaparer les femelles et s’assurer la transmission de leurs gènes. Ces combats se déroulent principalement par des affrontements de cornes, où le mâle dominant repousse ses rivaux. Les mâles marquent leur territoire en utilisant des glandes odorantes situées près des yeux et en effectuant des démonstrations visuelles et sonores pour attirer les femelles.
Après l’accouplement, la gestation dure environ six mois, aboutissant généralement à la naissance d’un unique faon en mai ou juin. À la naissance, le petit pèse entre 2 et 3 kg et est immédiatement capable de se tenir sur ses pattes. Toutefois, il reste caché dans la végétation pendant les premiers jours de sa vie, afin d’éviter les prédateurs.
La mère allaite son petit pendant environ un à deux mois, après quoi il commence à consommer des plantes tout en continuant à bénéficier du lait maternel. L’indépendance complète est atteinte vers six mois, mais les jeunes restent souvent en groupe avec leur mère jusqu’à la prochaine saison des naissances.
La longévité de la gazelle du Tibet varie en fonction des conditions environnementales et des menaces qu’elle rencontre tout au long de sa vie. En milieu naturel, cet animal a une espérance de vie moyenne de 8 à 10 ans, bien que certains individus puissent vivre un peu plus longtemps en l’absence de prédation ou de conditions extrêmes. En captivité, où les soins vétérinaires et l’accès à une alimentation régulière sont garantis, la durée de vie pourrait théoriquement être prolongée, mais l’espèce est rarement maintenue dans des zoos ou des centres de conservation.
La gazelle du Tibet est une espèce plutôt grégaire, bien que la taille des groupes varie en fonction des saisons. En été, les individus peuvent vivre en petits groupes de 5 à 20 membres, tandis qu’en hiver, lorsqu’ils se déplacent vers des zones plus clémentes, ils forment parfois des troupeaux plus grands pour mieux faire face aux rigueurs climatiques. Elle est diurne, avec une activité maximale aux premières heures du matin et en fin d’après-midi, périodes où la température est plus clémente.
Cette gazelle est nomade, se déplaçant en fonction de la disponibilité des ressources alimentaires et de la rigueur du climat. En hiver, elle descend vers des altitudes plus basses pour éviter les tempêtes de neige et trouver des pâturages plus accessibles. Face au danger, elle utilise sa vitesse et son agilité pour fuir. Elle peut atteindre jusqu’à 65 km/h en pointe et effectuer des bonds impressionnants pour semer ses poursuivants.
Illustration de la gazelle du Tibet Crédit photo: British Library CC0 (Domaine public)
PRÉDATION
La gazelle du Tibet évolue dans un environnement hostile où les conditions climatiques sont extrêmes et où la nourriture est parfois rare. Cependant, elle doit également faire face à plusieurs prédateurs naturels qui ciblent principalement les individus jeunes, malades ou affaiblis. Ses principaux ennemis sont :
* Loup de Chine : Le loup de Chine (ou loup tibétain) (Canis lupus filchneri), une sous-espèce du loup gris, est le principal prédateur de la gazelle du Tibet. Il est bien adapté aux conditions des hauts plateaux et chasse en solitaire ou en meute. Un loup seul s’attaque généralement à des individus jeunes, âgés ou affaiblis. Il les pourchasse sur de longues distances, profitant de leur fatigue pour les attraper. En meute, ils peuvent s'attaquer à des adultes en bonne santé. Ils travaillent en coordination pour isoler un individu du troupeau avant de le tuer.
* Lynx du Tibet : Le lynx du Tibet (Lynx lynx isabellinus), une sous-espèce du lynx commun, est un autre prédateur redoutable pour la gazelle du Tibet, bien qu’il s’attaque plutôt aux jeunes ou aux individus isolés. Contrairement aux loups, qui privilégient la course-poursuite, le lynx chasse en embuscade. Il attend patiemment que sa proie s’approche avant de bondir avec rapidité. Grâce à ses griffes acérées et sa mâchoire puissante, il peut tuer une jeune gazelle en quelques instants. Cependant, ce félin étant un chasseur solitaire et discret, son impact sur les populations de gazelles est moins important que celui du loup.
* Aigle royal : L'aigle royal (Aquila chrysaetos), un grand rapace présent sur les hauts plateaux, est un prédateur spécialisé des jeunes gazelles. Il repère ses proies depuis les airs grâce à une vue extrêmement perçante. Lorsqu’il identifie un faon ou une jeune gazelle affaiblie, il fond sur elle à une vitesse pouvant dépasser 240 km/h. Il utilise ses puissantes serres pour saisir sa proie et peut parfois l’emporter dans les airs avant de la lâcher sur un sol rocailleux pour la tuer instantanément.
* Renard roux tibétain : Le renard roux tibétain (Vulpes vulpes montana), une sous-espèce du renard roux, s’attaque rarement aux adultes, mais il peut chasser des faons laissés sans surveillance.
* Chien : Parfois, des chiens domestiques abandonnés ou retournés à l’état sauvage attaquent les gazelles, notamment dans les zones où l’activité humaine s’intensifie.
La perte d'habitat due au développement des pâturages et à l'augmentation du nombre de bétail domestique (en particulier du mouton domestique tibétain), sont probablement les principales menaces. À mesure que la population humaine augmente et que le niveau de vie s'améliore, le taux de chargement du bétail augmente dans les prairies et les steppes tibétaines. Cela conduit à son tour à l'augmentation des clôtures de pâturage, ce qui limite les déplacements et l'accès au fourrage et exclut systématiquement les gazelles du Tibet de certaines parties de leur ancienne aire de répartition, en particulier dans l'est. La construction de routes a également ouvert des zones auparavant éloignées au pâturage et à la chasse (illégale). La population indienne, beaucoup plus petite, a également été sévèrement réduite, principalement en raison de la chasse passée suivie d'une concurrence accrue avec le bétail.
La gazelle du Tibet est considérée comme une espèce moyennement menacée. Elle est inscrite dans la catégorie "Quasi menacée" (NT) sur la Liste rouge de l'IUCN.
Sur les plateaux tibétains, l'espèce se produit dans plusieurs parcs nationaux comme la réserve naturelle de Tang Chang qui est la deuxième plus grande réserve dans le monde avec une superficie de 300 000 km². La gazelle tibétaine est répertoriée comme une espèce protégée en Chine.