Le gypaète barbu (Gypaetus barbatus) est un rapace appartenant à la famille des Accipitridae. Cet oiseaufalconiforme est l'unique représentant du genre Gypaetus. Vautour majestueux que l'on trouve en Europe, le gypaète barbu reste un emblème de l’ornithologie montagnarde.
Le gypaète barbu est le plus grand des vautours. Unique en son genre, ce rapacenécrophage se distingue par sa tête étonnante aux yeux jaunes cerclés de rouge et par son bec sous lequel s’insère une sorte de barbe faite de soies noires qui a donné son nom à l’espèce. Il est aussi facilement identifiable grâce à ses ailes, longues et étroites, tenues légèrement arquées, et sa longue queue triangulaire.
Le dessous du corps des adultes est pâle, blanchâtre avec plus ou moins de jaune beigeâtre, ou souvent entièrement ochracé (teinte acquise lors de bains de sable), contrastant avec le dessous sombre des ailes. Par bonne lumière, les couvertures sous-alaires petites et moyennes sont noires. Le dessus du corps est gris plomb avec traits raciaux pâles.
Le plumage adulte est présent au bout de 5 ans environ. Les juvéniles ont le corps gris terne avec la tête, le cou et le haut de la poitrine gris foncé. Le dessus du corps est non uniformément gris avec des stries pâles (comme chez les adultes) mais bariolé : manteau, croupion et une partie des couvertures alaires pâles. La silhouette est également différente, avec la queue plus courte et les ailes plus larges et plus obtus.
En pleine lumière, lorsque le dessus du corps paraît pâle et se confond avec le fond rocheux, le gypaète barbu se repère souvent plus facilement grâce à son ombre défilant sur la paroi.
HABITAT
Le gypaète barbu habite les montagnes entrecoupées de précipices, de hauts plateaux et d’herbages. Dans l’Himalaya, il survole les plus hauts sommets à plus de 8 000 m d’altitude.
En France, le gypaète barbu est présent dans les Pyrénées et les Alpes. On le retrouve également dans les régions montagneuses d’Afrique du nord, en Asie, au Proche-Orient, en Iran et jusqu’en Chine.
ALIMENTATION
Les trois quart de la nourriture du gypaète barbu sont constitués d’os et de ligaments. Cette ressource alimentaire peut paraître peu nourrissante à première vue, néanmoins elle contient autant d’éléments énergétiques que la viande. De plus, elle possède l’avantage de n’être contestée par aucun autre animal.
Le gypaète repère les cadavres de moutons ou de chamois. Il peut attendre patiemment que les vautours aient nettoyé la partie molle de la carcasse. Il se saisit alors de leurs os qu’il laisse tomber d’une hauteur de 50 à 100 m sur un pan de falaise oblique ou sur une étendue rocheuse pour les briser.
Son gosier est large (70 mm et peut engloutir des os entiers mesurant jusqu’à 25 cm et faisant 35 mm de diamètre). Cependant, en période de pénurie, il lui arrive de capturer des proies vivantes telles que de petits mammifères, des insectes, des tortues ou des lézards.
REPRODUCTION
En automne, on peut observer les couples de gypaète barbu en train de construire ou d’aménager leur nid. Les gypaètes construisent plusieurs aires sur leur territoire, situés dans des anfractuosités de falaises inaccessibles et parfaitement à l’abri des intempéries.
Les nids sont occupés à intervalles de 4 ou 5 ans. Ce n’est pas le fruit du hasard. Ceci a pour but de permettre la disparition des parasites accumulés dans le nid. Il est situé généralement entre 700 et 2 000 m d’altitude, le plus souvent entre 1 500 et 1 800 m. Les matériaux utilisés sont multiples : branches, herbes, laine de mouton, poils d’origine animale, ossements, morceaux de peau, cordes, crins de chèvres.
La femelle gypaète dépose 1 ou 2 oeufs entre décembre et février. L’incubation dure environ de 55 à 60 jours, assurée par la femelle.
On dit que 24 heures après la naissance, les adultes tuent l’un des poussins afin de mieux élever l’autre. Il est aussi probable que le plus malingre périt affamé par le plus vigoureux, plus prompt à se nourrir.
La femelle s’occupe attentivement du petit, et reste au nid pendant plusieurs jours. Le mâle apporte la majeure partie des proies et des os.
Au mois de juin, le poussin a déjà la corpulence de l’adulte, et son plumage est brun, plus foncé sur la tête et le cou. C’est une période où il est inquiet, marchant de long en large sur l’étroite corniche. Les adultes viennent le voir fréquemment, mais ne l’alimentent que deux fois par jour. Le jeune donne des coups de bec et ôte la chair des os apportés, et en les tapant, il prélève des fragments d’os qu’il engloutit aussitôt. Il devient vite capable d’avaler des os de 20 cm de long, avec quelques contorsions.
Il quitte le nid au bout de 4 mois, restant à proximité où il est toujours nourri par la femelle pendant 2 mois de plus. Quand il devient indépendant, il rejoint 2 ou 3 autres jeunes, et ils rejoignent les vautours autour des carcasses dont ils sont souvent délogés par les corvidés.
Cette espèce, bien que passant 6 mois par an à nidifier, peut se reproduire chaque année si le couple n’est pas dérangé.
COMPORTEMENT
Le gypaète barbu pratique souvent le vol à voile, mais se comporte de façon plus active que les autres vautours. Lorsqu’il explore les pentes montagneuses sans battre des ailes, il paraît voler au ralenti, du fait de sa taille et, souvent de l’éloignement.
La particularité la plus étonnante de ce rapace est de laisse tomber les os qu’il a ramassés pour les briser sur des rochers afin d’en extraire la moelle, d’où son surnom de "casseur d’os". Les couples sont unis pour la vie.
VOL
Le gypaète barbu ne peut être confondu avec aucun autre rapace en vol. Quand il est en ascension ou qu’il plane, ses ailes sont souvent courbées, mains vers le bas mais pointe des ailes vers le haut. Il tournoie souvent ailes horizontales.
Il pratique rarement le vol battu, avec des mouvements lents, mais souples et légers, et bien plus rapides que ceux des autres vautours. Quand il vole face au vent, les bras sont abaissés, et le bout des ailes tourné vers le haut.
MENACES
Le gypaète barbu est le rapace le plus menacé d’Europe et il est encore malheureusement victime de l’homme. Pendant des siècles, cet oiseau a fait l’objet d’une haine imbécile qui glorifiait sa destruction. Il fut même présenté comme une bête féroce n’hésitant pas à enlever les enfants. Persécuté, il a disparu de nombreuses montagnes d’Europe depuis le début du XIXème siècle. L’usage d’appâts empoisonnés, le dénichage et le tir pour alimenter les collections zoologiques en ont fait une espèce fortement menacée.
De plus, cette espèce est très fragile. En effet, un couple n’élève avec succès, en moyenne, qu’1 poussin tous les 3 ans. Un tiers des jeunes atteindra l’âge adulte (7 ans). La vitalité de l’espèce repose sur sa longévité qui peut dépasser 30 ans.
Aujourd’hui, en Europe, le gypaète barbu survit dans les Pyrénées, en Corse et en Crète, et il revit dans les Alpes, depuis 1986. L’effectif européen s’élève à 130 couples. La France comptait au printemps 2001, 37 couples (10 en Corse, 2 dans les Alpes et 25 dans les Pyrénées) qui ont donné naissance à 7 poussins.
RÉINTRODUCTION
Le gypaète barbu est l’un des rapaces les plus rares d’Europe. Dans les Pyrénées, le nombre de couple est passé de 61 à 101 entre 1995 et 2002, et l’évolution est également positive dans les Alpes, avec des programmes de réintroduction sur l’ensemble du massif.
Depuis les années 1970 il fait l’objet de divers programmes internationaux de réintroduction dans les alpes autrichiennes, françaises, italiennes et suisses.
Depuis la fin des années 1980, il est l’objet d’un programme réussi de réintroduction dans les Alpes françaises (Haute-Savoie, Savoie, Isère et Mercantour). Au total, depuis 1986, 137 gypaètes barbus ont été réintroduits, formant en 2006, une vingtaine de couples dans tout l’arc alpin. Lors de la seule année 2005, 8 gypaètes barbus ont été réintroduits dans l’arc alpin et 7 poussins sont nés dans la nature. Au total depuis le début 27 jeunes sont nés ainsi et se sont envolés. En Suisse, un petit gypaète barbu est sorti de son œuf fin mars 2007 au col de l’Ofen, aux Grisons, au-dessus du Parc national suisse.
Depuis 1998, un nouveau programme Life nature, intitulé "Conservation du gypaète barbu dans les Alpes françaises" et piloté par l’association Asters, réunit 7 pays dans le but d’établir une population autonome et naturelle de gypaètes barbus dans l’ensemble des Alpes. Dans le cadre de ce programme, ont été prises des actions de sensibilisation auprès du grand public, de création d’observatoires, de protection des sites de nidification et de vie, de mise en place de balises rouges sur les câbles aériens et de suivi des oiseaux par satellite.
SOUS-ESPÈCES
Selon la classification actuelle, l'ITIS reconnaît trois sous-espèces distinctes de gypaète barbu :