Les anoures (Anura), réunissant les grenouilles, les crapauds et les rainettes, sont de tous les amphibiens à la fois les plus nombreux et ceux dont la diversité est la plus grande. Ils regroupent près de 3 500 espèces, dont l'habitat s'étend du désert à la savane, des régions de haute montagne aux forêts tropicales. Bien que la plupart des anoures partagent leur vie entre le milieu aquatique et le milieu terrestre, certaines espèces sont exclusivement aquatiques et d'autres exclusivement terrestres.
C'est dans les régions tropicales que les anoures présentent la plus grande diversité (plus de 80 % de toutes les espèces), toutefois nombreuses sont les espèces ayant colonisé avec succès les régions tempérées.
Le trait principal qui distingue les grenouilles et les crapauds des autres amphibiens est l'absence de queue chez l'adulte. Au fil de l'évolution, ces animaux étant devenus des sauteurs, la présence d'une queue ne pouvait que les gêner dans leurs mouvements. Leur corps est nettement plus court que chez les autres amphibiens.
Les grenouilles sont des animaux à peau lisse, aux membres longs et aux moeurs aquatiques. En revanche, les crapauds sont des créatures à l'aspect repoussant, au corps trapu et à la peau rugueuse, vivant dans des endroits sombres et humides, mais pas dans l'eau. Néanmoins, ces deux types de conformation physique sont avant tout le fait d'une adaptation à deux modes de vie différents, et ils ne reflètent pas une divergence entre deux lignées évolutives.
Les anoures qui passent la majeure partie de leur vie dans l'eau possèdent généralement un corps mince et allongé, une longue tête au museau en pointe et de longs membres postérieurs. Cette structure à la fois aérodynamique et hydrodynamique est idéale pour permettre à l'animal de sauter et de nager. Sur la terre ferme, ces animaux se montrent généralement très farouches : à peine dérangés dans leurs activités, ils sautent dans l'eau et s'éloignent à vive allure. En revanche, les anoures vivants sur la terre ferme ou enfouis dans le sol ont un corps court et ramassé ainsi que des membres très courts. Leurs pieds sont généralement larges, pourvus de doigts spatulés et d'excroissances de peau cornée (les tubercules) qui leur permettent de creuser la terre. Certaines espèces possèdent également sur le crâne et le museau une crête acérée grâce à laquelle l'animal peut creuser même dans un sol dur. Les grenouillesarboricoles quant à elles ont un corps aplati facilitant leur équilibre lorsqu'elles élisent domicile sur les feuillages ou sur un tronc d'arbre, le ventre de l'animal étant suffisamment flasque pour épouser à peu près toutes les formes. Chez de nombreuses espèces arboricoles, les doigts et les orteils sont pourvus de pelotes adhésives dont la fonction est la même que la peau flasque sur le ventre. Chez d'autres espèces, les doigts des membres postérieurs comportent des os et des cartilages supplémentaires permettant à l'animal de s'agripper à de fines brindilles. Ces doigts présentent également des pelotes adhésives en forme de disques, facilitant l'escalade des parois verticales lisses.
Chez les anoures, la tête est dans le droit prolongement du corps, n'étant pas séparé de celui-ci par un cou plus étroit. Les narines et les yeux sont généralement proéminents. Ainsi, dans l'eau, l'animal peut continuer de respirer et de surveiller les alentours tout en restant caché. L'adulte est pourvu de bronches lui permettant de respirer sur la terre ferme, et sa peau contribue également à l'assimilation de l'oxygène. Certains anoures vivant dans des eaux très pauvres en oxygène sont pourvus d'une peau très lâche ou coiffés de touffes de poils irrigués par des vaisseaux capillaires. Ce genre d'adaptation a pour effet d'accroître la surface utile à la respiration et de puiser un maximum d'oxygène lorsque celui-ci est rare.
Chez certaines espèces, la rétine de l'oeil et le cerveau sont pourvus de récepteurs spécialisés, les "détecteurs d'insectes, dont la fonction est de repérer les petits organismes qui passent dans les parages. La plupart des espèces sont pourvues d'un tympan localisé juste derrière l'oeil. Les anoures sont les plus primitifs des vertébrés chez qui l'oreille moyenne comporte une cavité assurant la transmission des vibrations sonores entre le tympan et l'oreille interne. Joint à cette évolution au niveau de l'oreille, l'animal possède une vraie cage vocale (le larynx) et un sac vocal très développé et dilatable lui permettant un large éventail de vocalisations.
RÉGULATION THERMIQUE ET HYDRIQUE
Les anoures sont des animaux à sang froid (hétérothermes) et si leur métabolisme leur assure une certaine chaleur interne, leur régulation en température reste cependant essentiellement tributaire des sources de chaleur présente dans l'environnement. Leur température interne est en principe très proche de celle du milieu ambiant. Selon les conditions climatiques, elle peut varier de 3° à 36° Celsius. À basse température, durant l'hiver dans les régions tempérées, l'animal entre en hibernation, la plupart des espèces peuvent survivre à des températures de 0° à 9° Celsius. Pendant la journée, il n'est pas rare que des grenouilles se prélassent au soleil en s'étirant de tout leur long afin d'augmenter leur température interne. Mais, dans la mesure où cela entraîne une déperdition aqueuse, les seules espèces ayant recours à cette méthode sont celles qui vivent à proximité d'un plan d'eau permanent. En revanche, les anoures des régions très chaudes s'enterrent durant la journée pour s'abriter du soleil et ne sortent que la nuit.
Les espèces vivant dans le désert sont celles qui supportent le mieux la déperdition aqueuse. Ainsi, le pied-en-bêche occidental (Spea hammondii), qui a son habitat dans les plaines arides et les déserts d'Amérique du Nord, peut endurer une déperdition aqueuse de 60 %, tandis que la rainette aquatique (Rana grylio) ne supporte guère plus de 40 % de déperdition. Par ailleurs, les espèces des régions arides ont la capacité de se réhydrater plus rapidement que leurs homologues des régions humides. Certains crapauds, comme le crapaud commun et les espèces du genre Pelobates ont la faculté d'absorber de l'eau simplement en restant assis sur un sol humide. La peau de leur croupion est fine et abondamment irriguée par des vaisseaux sanguins, faisant en quelque sorte office d'éponge.
Nombre de grenouilles fouisseuses ont la possibilité d'emmagasiner l'eau dans leur vessie, ce qui leur permet de rester sous terre pendant de longues périodes sans se déshydrater. Lorsque l'animal a besoin de se réhydrater, une partie de l'eau contenue dans la vessie filtre par les parois de celle-ci pour se répandre dans l'organisme. La rainette australienne (Dryopsophus platycephalus) est pourvue de grosses glandes lymphatiques sous-cutanées en forme de poches, qui, lorsqu'elles sont pleines d'eau, donnent à l'animal une allure bouffie, cette eau représentant la moitié de son poids. En période de sécheresse, une grenouille fouisseuse peut rester inactive pendant plusieurs mois, voire plusieurs années. Quant aux Pelobates, après une vague de sécheresse, ils sortent de terre dès qu'ils entendent le crépitement de la pluie sur le sol.
Certains anoures des régions arides se distinguent à la fois par leur anatomie et par leur comportement lorsqu'il s'agit d'éviter la déperdition d'eau. Certaines grenouilles excrètent de l'acide urique sous une forme pâteuse plutôt que de l'urée qui, soluble dans l'eau, entrainerait une déperdition aqueuse plus importante.
HABITAT
Les anoures sont présents sur tous les continents sauf en Antarctique ainsi que sur diverses iles éloignées des continents. Certaines espèces se limitent à des zones géographiques restreintes du fait de changement de climat ou de territoires inhospitaliers comme les étendues de mer, les chaînes montagneuses, les déserts, les forêts coupées à blanc, les routes ou diverses autres constructions humaines qui constituent des barrières infranchissables pour ces animaux. La plus grande diversité d'anoures vit dans les zones tropicales plutôt que dans les zones tempérées comme l'Europe. Certaines grenouilles vivent dans des habitats arides, comme les déserts, grâce à des adaptations adéquates. Certaines grenouilles sont adaptées aux environnements froids. La grenouille des bois (Rana sylvatica), dont l'habitat s'étend dans le cercle Arctique, creuse dans le sol en hiver. Bien que la plupart de son corps gèle à ce moment, elle protège ses organes vitaux des dommages grâce à la très forte concentration de glucose présent dans son corps.
ALIMENTATION
Les têtards sont principalement herbivores. Certains ne le sont que partiellement et se nourrissent également d'animaux morts. La plupart sont aussi capables de se nourrir par filtrage, ce qui leur permet de survivre pendant des mois en absorbant seulement des algues microscopiques et des micro-organismes en suspension dans l'eau. Absorbée par la bouche, l'eau est filtrée par les branchies, lesquelles assurent le prélèvement du plancton.
Les anoures sont pour la plupart carnivores. Ils mangent principalement des insectes et des mollusques, mais des individus plus gros peuvent manger des serpents, des oiseaux, des poissons et d’autres amphibiens. En effet le cannibalisme est très fréquent chez les anoures. Ils se servent de leur langue pour attraper leurs proies. Ils repèrent une victime, ne s’arrêtent pas trop loin d’elle et restent immobiles, D’un coup ils vont bondir, projeter leur langue visqueuse et collante à laquelle s’accrochera la victime. Une fois qu’ils ont rentré leur langue, ils écrasent la proie avec leurs maxillaires.
REPRODUCTION ET DÉVELOPPEMENT
La saison des amours des grenouilles et des crapauds ne passe pas inaperçue. En effet, on les voit se rassembler, souvent par centaines, faisant un tapage impressionnant. En temps normal, la plupart des colonies de grenouilles sont largement disséminées à travers les secteurs où les unes et les autres se procurent leur nourriture. Mais lorsque vient le moment de la reproduction, elles commencent leur migration en quête d'un site approprié. La longueur du jour, la température et la pluviosité sont les trois grands facteurs qui annoncent le début de la saison des amours.
La migration vers les sites de reproduction est extrêmement synchronisée et elle peut concerner d'immenses colonies de grenouilles. Il fut un temps où la migration de printemps chez les rainettes australiennes (Dryopsophus platycephalus) était d'une telle ampleur qu'elle paralysait le trafic ferroviaire. Les roues des trains patinaient sur les rails ou d'innombrables grenouilles étaient écrasées sur leur passage.
Certaines espèces qui se reproduisent dans les plans d'eau permanents et les lacs se montrent remarquablement fidèles au site qu'elles ont choisi. Différents repères naturels guident leur migration vers les sites de reproduction, dont les odeurs, le degré d'humidité, divers indices sur le terrain ainsi que les appels des autres grenouilles.
Tant par leur taille que par leur forme, les paquets d'oeufs déposés dans l'eau par les grenouilles et les crapauds varient considérablement. En eau froide, l'oeuf est généralement de forme globulaire, tandis qu'en eau chaude, où l'oxygène est plus rare, les oeufs forment une fine pellicule à la surface de l'eau, de façon que chaque embryon dispose d'une quantité d'oxygène suffisante. Dans plusieurs familles, la grenouille pond des oeufs dans des nids d'écume flottants ou bien suspendus à la végétation surplombant le plan d'eau. Pour confectionner son nid d'écume, la femelle répand quelques gouttes d'une sécrétion liquide, qu'elle "fouette" ensuite à grand renfort de coups de patte, comme une meringue, jusqu'à ce qu'elle durcisse. Chez quelques espèces qui nidifient dans les arbres, un ou deux mâles peuvent apporter leur aide dans cette opération.
Au lieu de déposer dans l'eau une multitude de petits oeufs, certaines espèces tendent à pondre des oeufs moins nombreux, plus gros et sur lesquels les parents veilleront. Chez les anoures, le "maternage" est souvent (mais pas toujours) associé à la ponte sur la terre ferme. Les parents se chargent alors de couver les oeufs, de leur assurer une humidité suffisante et de les préserver des attaques des prédateurs. Chez certaines espèces, les têtards achèvent leur développement dans une poche d'incubation dont est doté un des parents. Les femelles crapauds d'Afrique de l'Ouest (Nimbaphrynoides occidentalis) nourrissent leurs embryons dans leurs oviductes, à la façon des placentaires.
La durée de la phase du têtard est comprise entre quelques jours chez certaines espèces et plus de trois ans chez les autres. Les espèces se reproduisant sur la terre ferme sont celles chez qui la croissance est la plus rapide. L'embryon connaît un développement qualifié de direct : au lieu de passer par un stade aquatique libre durant lequel il pourvoit lui-même à sa subsistance, le têtard conserve l'immobilité, se nourrissant exclusivement des nutriments contenus dans la membrane vitelline.
COMMUNICATION
Le cri ou coassement des anoures est spécifique à ces espèces. Les anoures créent ce son en faisant passer l'air à travers leur larynx. Chez la plupart des grenouilles qui coassent, ce cri est amplifié par un ou plusieurs sacs vocaux, des membranes de peau placées sous la gorge ou dans le coin de la bouche, qui se détendent au cours du cri. Certains coassements sont si bruyants qu'ils peuvent être entendus à plus d'un kilomètre.
Les espèces des genres Heleioporus et Neobatrachus n'ont pas de sac vocal mais sont tout de même capables d'émettre un cri puissant. Leur bouche est élargie et à la forme d'un dôme, et agit comme une caisse de résonance qui amplifie le son. Celles qui n'ont pas de coassement bruyant sont généralement celles qui vivent dans les zones proches d'eau coulant en provoquant un bruit continu. Elles ont besoin d'utiliser d'autres stratégies pour communiquer. La grenouille-à-queue côtière (Ascaphus truei) vit dans les ruisseaux de montagne en Amérique du Nord et n'émet pas de chant.
Le but du coassement est d'attirer une partenaire pour les mâles. Ils peuvent chanter seuls ou en groupe lorsque de nombreux mâles ont convergé vers un même site de reproduction. Les femelles de plusieurs espèces de grenouilles, comme la rainette dorée (Polypedates leucomystax), répondent aux cris du mâle, ce qui renforce l'activité reproductive dans une colonie55. Les femelles préfèrent les mâles qui produisent des sons de grande intensité et de basse fréquence, des caractéristiques qui les font sortir du lot dans un choeur.
Un cri différent est émis par un mâle ou une femelle non réceptive lorsqu'un autre mâle tente de la chevaucher. Il s'agit d'un gazouillis caractéristique qui est accompagné d'une vibration du corps. Les grenouillesarboricoles et certaines espèces non-aquatiques ont un chant particulier qu'elles entonnent avant une pluie, qu'elles anticipent sur la base de l'humidité de l'air ambiant. Certaines espèces ont également un chant territorial qui permet de chasser les autres mâles. Les anoures émettent ces chants avec la bouche fermée. Un appel de détresse, émis par certaines grenouilles quand elles sont en danger, est produit avec la gueule ouverte, ce qui permet un cri un peu plus fort.
LISTE DES FAMILLES
Environ 88 % des amphibiens appartiennent à l'ordre des anoures. Cet ordre comprend environ 4 810 espèces appartenant à 54 familles, parmi lesquelles les Leptodactylidae (1 100 espèces), les Hylidae (800 espèces) et les Ranidae (750 espèces) sont les plus importantes.
Certaines espèces d'anoures s'hybrident communément. Par exemple, la grenouille verte d'Europe est un hybride entre la petite grenouille verte (Pelophylax lessonae) et la grenouille rieuse (Pelophylax ridibundus). Le sonneur à ventre de feu (Bombina bombina) et le sonneur à ventre jaune (Bombina variegata) sont également très proches et peuvent s'hybrider. Les hybride sont moins fertiles que leurs parents, et on trouve une zone d'hybridation où ils sont très répandus.
La liste ci-dessous répertorie les familles actuelles appartenant à l'ordre des anoures selon Amphibian Species of the World datant du 17 septembre 2014.